Un couple de russes d’une quarantaine d’années, en situation régulière, vient de connaître des sommets dans les traitements indignes infligés quotidiennement par le 115 et le CHUS (Centre d’Hébergement d’Urgence Sociale). Arrivés en France le 13 mai dernier et à Poitiers le 14 mai, alors que la Croix Rouge connaissait leur situation dès leur arrivée, et leurs appels quotidiens au 115, ils sont restés à la rue 10 jours et 10 nuits jusqu’au 24 mai. Ils ont ensuite été hébergés au CHUS dans les conditions que nous connaissons : les locaux du CHUS sont vétustes, ce sont des dortoirs, ils n’ont donc plus de vie de couple. Sauf le week-end, ils doivent sortir à 11h00 le matin et ne pas y revenir avant 16h00 et pas après 21h. D’autre part si madame est hébergée mais seulement la nuit, monsieur n’est hébergé qu’une nuit sur 3 ou 4.
Nous savons maintenant que tout cela est des plus illégal. Car, malgré la loi qui stipule que « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence » (Code de l’Action Sociale et des Familles, article L345-2-2), l’accueil inconditionnel à Poitiers comme ailleurs, n’est pas assuré à cause du manque de places – des personnes seules et des familles se retrouvent régulièrement à la rue.
De plus, si les femmes et les enfants sont à peu près toujours accueillis à terme, les hommes « tournent » c’est-à-dire ne sont hébergés qu’une nuit sur deux ou trois voire qu’une nuit par semaine, hiver comme été. Ce qui est là-aussi une violation caractérisée des droits des personnes car « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation ». (Code de l’Action Sociale et des Familles, article L.345-2-3)
Ce qui est confirmé d’abord dans une ordonnance du 11 janvier 2013, le tribunal administratif a reconnu le « droit au maintien » de la personne dans une structure d’hébergement comme liberté fondamentale, permettant de saisir le juge administratif en urgence dans le cadre d’une fin de prise en charge. Le juge a enjoint au Préfet de proposer une orientation à la personne vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation, comme le prévoit la loi (article L. 345-2-3 du Code de l’action sociale et des familles). TA Paris, 11 janvier 2013, n°1300311/9
Ensuite, dans une ordonnance en date du 17 juillet 2014, rendue par le juge des référés du Tribunal Administratif de Paris sous le n° 1411665/9-1, qui consacre le droit de demeurer dans une structure d’hébergement stipulé à l’article 345-2-3 du code de l’action sociale et des familles et enjoint au préfet d’Ile de France , préfet de Paris, de proposer une structure d’hébergement.
Mais ce n’est pas tout. Malgré la loi qui prévoit un « accueil digne », les locaux du CHUS sont vétustes, insalubres, il y pousse des champignons [VOIR : Poitiers : Vous aimez les champignons ? Faites le 115 !], on vous impose une vie en dortoirs séparés, les hommes d’un coté, les femmes et les enfants d’un autre. Malgré la loi qui prévoit un accueil continu, les personnes et les familles doivent sortir à 10h30 le matin et ne pas y revenir avant 16h15 et pas après 21h. Et le règlement est draconien, il n’est pas rare d’être puni à rester à la rue ou à faire des réparations. Malgré la loi qui, outre le gîte et l’hygiène, prévoit le couvert, il n’y a pas de repas servis le soir ni a fortiori le midi.
La préfecture et la Croix Rouge, sachant qu’elles ne risquent rien puisqu’elles bénéficient de la complicité du tribunal administratif [VOIR : Préfecture hors-la-loi, Tribunal Administratif complice ! ], violent allègrement les lois et bafouent les droits des personnes.
Pour en revenir à ce couple de russes, ces conditions de vie imposées par le 115 et le CHUS ont rendu très difficile leur existence et la coexistence avec les autres résidents. L’exiguïté des locaux et la promiscuité provoquent des conflits, ce qui a détérioré encore énormément leurs conditions d’existence qui étaient déjà très précaires.
Nous soupçonnons le personnel de la Croix Rouge d’utiliser ces conflits constants et ces mauvaises relations entre les résidents pour leur pourrir encore plus la vie et les pousser dehors, en clair les expulser illégalement, sans avoir à s’occuper d’eux. Madame souffre énormément de ces conditions d’accueil très dégradées. Elle a très peur d’une résidente qui est très agressive, crie beaucoup et la harcèle depuis le début du mois de juin, au point de faire des crises de stress et d’avoir été hospitalisée aux urgences deux fois. Et certains personnels du CHUS mettent systématiquement madame dans le même dortoir que cette personne qui est très agressive avec elle alors qu’il y a des places dans d’autres dortoirs.
Les nuits du 30 et 31 août, bien qu’étant mise par la Croix Rouge dans le même dortoir que la personne agressive qui la harcèle, madame n’y a pas dormi. Elle a dormi dans un dortoir au 3ème étage où il y avait une place de libre et où la résidente qui y dormait avec ses deux enfants l’acceptait et lui disait toujours de venir dormir avec elle. Elle a pu se reposer le plus tranquillement qu’il lui était permis. Mais le soir du premier septembre, alors que madame se préparait encore à coucher au 3ème étage comme la veille et l’avant veille, le travailleur social, qui n’était pas là les deux nuits précédentes, est venu en hurlant et en disant qu’elle dérangeait les enfants, qu’il y avait école le lendemain. Madame, très choquée, stressée, a fait une crise de tétanie. Monsieur, qui n’était pas hébergé pour la nuit mais qui était encore dans les locaux a voulu aller voir sa femme mais le travailleurs social lui a barré le passage et lui a dit que sa femme n’avait pas besoin de lui. Elle a dit à madame d’arrêter de simuler et de se donner en spectacle et a appelé le directeur. Monsieur, très inquiet pour sa femme, est sorti du CHUS et a appelé la police et le SAMU. Madame a été conduite aux urgences et y est restée la nuit. La police est venue au CHUS, a parlé rapidement avec monsieur, a parlé avec le directeur et est partie.
Le lendemain, 2 septembre 11h30, monsieur est allé au rendez-vous donné par la Croix Rouge. Les travailleurs sociaux ont dit à monsieur qu’ils devaient quitter le CHUS parce que sa femme ne dormait pas à la place qu’on lui donnait. Exclusion qui pour nous s’apparente à une expulsion puisqu’il semble que ce soit définitif.
En effet, monsieur a appelé le 115 en présence de sa femme et de deux membres du Dal86 qui peuvent en témoigner. La standardiste a été très claire quand elle lui a répondu : « Désolée, pas de place pour ce soir » et lorsque monsieur lui a demandé : « seulement pour ce soir ? » elle a répondu froidement : « non, pour ce soir et pour toujours ! »
Condamnée définitivement et illégalement à la rue pour avoir fait des malaises et ne pas avoir dormi à la place assignée…Condamné définitivement et illégalement à la rue parce que sa femme fait des malaises et n’a pas dormi à la place assignée. Condamnés définitivement et illégalement à la rue parce qu’ils ne supportent pas les conditions d’existence inhumaines du CHUS. Ça laisse sans voix !
La Croix Rouge, comme l’OFII [VOIR : L’OFII : rouage essentiel de la machine à expulser ! ] est bien un rouage essentiel de la machine à expulser.
DAL86 – dal86@free.fr – 06 52 93 54 44 / 05 49 88 94 56
Permanences : tous les samedis matin de 11h à 12h Maison de la Solidarité 22 rue du Pigeon Blanc Poitiers
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