Nous ne le répéterons pas assez. Nous ne pouvons que nous en réjouir, la politique de l’immigration, la politique du tout expulsion des migrants en situation irrégulière est un énorme fiasco. Et, devant les grosses difficultés qu’ils ont à expulser, les pouvoirs publics sont amenés à utiliser des méthodes expéditives et brutales pour faire partir les gens d’eux-mêmes de Poitiers et de France : l’indignité et les carences du CHUS (Centre d’Hébergement d’Urgence Sociale), l’impuissance du SIAO (Service Intégré d’Accueil et d’Orientation), le défaussement du social sur le caritatif, mais aussi, les mauvais traitements, la violation des droits élémentaires des personnes : l’affamement, la privation de moyen de se loger et de soins…, les discriminations, le harcèlement policier avec contrôles à répétitions, arrestations, placement en garde à vue, placement en centre de rétention ou en prison, les procès innombrables, les tentatives d’expulsions, les expulsions, le harcèlement administratif avec ses procédures ubuesques et les « dysfonctionnements » des services de la préfecture, le harcèlement juridique, le torpillage des associations de soutien et d’accompagnement et la répression à leur égard, la désactivation des services sociaux, les expulsions des logements CADA… Ces méthodes qui participent à l’entreprise de dissuasion et d’intimidation des migrants et autres indésirables, sont au mieux à la limite de la légalité – mais franchement illégitimes-, au pire clairement illégales.
Nous n’arrêtons pas de décortiquer ces méthodes et d’en découvrir de nouvelles, qui visent toujours à démolir les familles, les couples et les personnes, que les pouvoirs publics ont du mal à expulser, pour les faire partir d’eux-mêmes.
Dernière situation en date, la famille Kh. azerbaïdjanaise, composée du père de 60 ans, de la mère de 49 ans, de leurs trois enfants, deux fils de 30 et 26 ans et une fille de 28 ans et de leur gendre de 30 ans, est arrivée en France et à Poitiers le 11 janvier 2013. Ils ont pris rendez-vous à la préfecture le 15 janvier. Rendez-vous obtenu pour le 25 février, soit un long mois et demi plus tard ! Date à laquelle il ont été reconnu comme demandeurs d’asile et, comprenne qui pourra, ont eu d’abord un récépissé de un mois, puis un récépissé de 6 mois et maintenant ils n’ont qu’un récépissé de 3 mois.
Ils ont d’abord passé 18 jours dehors dans la rue en plein hiver. Puis le 29 janvier ont obtenu une place au CHUS (Centre d’Hébergement d’Urgence Sociale) pendant 2 mois et demi, jusqu’au 10 avril, date à laquelle ils ont obtenu un logement HUDA (Hébergement d’Urgence pour les Demandeurs d’Asile) chez Coallia. Il y avait 4 chambres, une pour le père et la mère, une pour la fille et son conjoint et une pour chacun des deux fils.
La compagne de leur fils le plus jeune est arrivée en France et à Poitiers le 10 juin 2013. Comme elle n’était pas encore demandeuse d’asile, elle ne pouvait pas dormir dans la chambre de son conjoint dans le logement HUDA, et comme le 115 ne voulait pas l’héberger, son conjoint lui a payé l’hôtel avec son ATA (Allocation Temporaire d’Attente) jusqu’au 15 juillet, date à laquelle elle a été reconnue comme demandeuse d’asile et obtenu un récépissé . Elle avait pris son rendez vous en préfecture le 15 juin.
Le 26 août, le couple dont la jeune femme est enceinte de deux mois, qui avaient naturellement une chambre pour eux dans l’appartement HUDA avec le reste de la famille a été déplacé par l’OFII à La Rochelle, chez ALTHEA, durant 6 mois, jusqu’à fin février 2014 date à laquelle une assistante sociale du CADA de La Rochelle a dit que l’OFII voulait qu’ils retournent habiter à Poitiers avec leur famille car une grande famille avait besoin du logement qu’ils occupaient à La Rochelle.
Ils sont revenus sur Poitiers et ont réintégré la chambre dans l’appartement HUDA familial chez Coallia, chambre qui était restée tout ce temps vide et fermée à clef. Le 11 du mois suivant, soit le 11mars, leur fils naissait. De santé fragile, il a été hospitalisé 7 jours quand il avait 40 jours, le 20 avril, personne ne pouvait s’approcher du lui à cause des virus. Ça persiste encore aujourd’hui
Son père, le plus jeune des fils de cette famille élargie, est lui aussi de santé très fragile, ce que le stress fait grandement empirer. Il a un ulcère à l’estomac, et fait des malaises au point qu’il a été hospitalisé aux urgences de très nombreuses fois, au moins deux fois par semaine soit plus d’une centaine de fois en tout. Il fait des crises d’angoisse avec palpitations et détresse respiratoire.
Le 25 juillet, l’OFII a téléphoné a dit au couple du plus jeune fils que comme ils ont un enfant, enfant qui avait quand même 4 mois, ils habiteraient désormais tout seuls. Et l’OFII les a déplacés au CADA d’Eymoutiers à 45 km de Limoges.
Le 30 juillet, ils partent à Eymoutiers. Sans voiture, sans hôpital, isolés dans un village de 2000 habitants, en pleine campagne, c’est le début du plateau des Mille Vaches, loin de leurs attaches familiales de Poitiers, ils prennent peur, craquent, repartent le jour même et reviennent à Poitiers.
Le 31 juillet, ils retournent à l’OFII. L’une des salariées leur dit : « toutes les portes sont fermées pour vous » et quand ils lui disent qu’ils dorment dans leur voiture avec leur enfant de 4 mois, alors précisons-le que leur chambre dans le logement HUDA familial de Coallia est libre et fermée à clef, elle répond : « c’est normal, c’est le 115 ». Ils ont signé un papier, où il était écrit, semble-t-il en français, quelque chose qu’ils n’ont pas compris et n’ont pas eu de double.
Nous pourrions penser que c’est du n’importe quoi. Pourtant à y regarder de plus près, c’est imparable. Cette famille a été piégée par l’OFII. La pression a été judicieusement mise sur le plus jeune fils qui, fragile et stressé – il passe sa vie aux urgences -, est le maillon faible de la famille. D’abord l’OFII, l’isole du reste de la famille lui et sa compagne juste arrivée et enceinte de deux mois, et les exile à La Rochelle durant six mois. Le comble : il y avait toujours une place pour eux dans l’appartement HUDA de Coallia où résidait le reste de la famille, leur chambre est restée tout ce temps vide et fermée à clef. Au bout de six mois, l’OFII ayant une autre famille à héberger dans le logement CADA de La Rochelle, fait revenir le jeune couple, dont la femme est sur le point d’accoucher, à Poitiers où ils réintègrent la chambre qu’ils avaient quittée six mois plus tôt. Leur fils naît quelques jours plus tard. Lorsqu’il a un mois et demi il est hospitalisé une semaine pour une déficience immunitaire. Nous pourrions penser que leur calvaire va s’arrêter là mais c’est mal connaître la persévérance de l’OFII à s’acharner sur les personnes et à les détruire. Fin juillet, rebelote, l’isolement au CADA de La Rochelle ayant été inefficace, l’OFII trouve une solution encore plus dissuasive : le CADA d’Eymoutiers. Là, sans voiture, isolés dans un village de 2000 habitants à 45 km de Limoges, en pleine campagne, loin de leurs attaches familiales de Poitiers, et surtout, sachant que le père et l’enfant sont de santé très fragile, sans hôpital, le jeune couple craque et revient sur Poitiers. Là, la famille avec un enfant de 4 mois immunodéficient et le père dépressif et fortement stressé est à la rue, le 115 n’ayant pas de place pour eux.
Refus d’hébergement, perte de leur ATA, l’OFII peut exulter. Surtout, étant en détresse et démunis de tout, couchant et vivant dans la rue, le reste de la famille risque de les prendre chez eux -où d’ailleurs ils étaient il y a quelques jours. Et puisque c’est interdit sous peine d’être viré de l’HUDA, toute la famille risque de se retrouver à la rue et sans rien. Ça c’est de l’accueil de demandeurs d’asile ! Non assistance à personnes en danger, violation de la convention internationale des droits de l’enfant et du droit au logement, abus de faiblesse, bravo la préfecture, bravo l’OFII, bravo Coallia, bravo le 115 ! Tous ce sont acharnés à faire leur « sale boulot ».
Nous demandons expressément à la préfecture et à l’OFII de reconsidérer la situation de cette famille rappelons-le avec un petit enfant de 4 mois. Vu les conditions d’accueil du CHUS, le traitement que l’OFII leur a fait subir, leur situation sanitaire, et pour des raisons humanitaires, nous demandons à minima que leur soit fournie un hébergement d’urgence à l’hôtel. Tout en sachant très bien que cette solution est chère très et vraiment pas pratique. La meilleure solution, celle qui serait même gratuite, serait que le jeune couple réintègre la chambre qu’il n’aurait jamais dû quitter dans l’appartement CADA avec le reste de leur famille chez Coallia. Et vu les mauvais traitements subits à répétition, la préfecture et l’OFII devraient faire amende honorable et annuler leur refus de CADA et leur redonner l’ATA. Nous aurons alors toutes les raisons de penser que cette affaire n’est qu’un mauvais concours de circonstances et nous ferons bien-sûr amende honorable.
DAL86 – dal86@free.fr – 06 52 93 54 44 / 05 49 88 94 56
Permanences : tous les samedis matin de 11h à 12h Maison de la Solidarité 22 rue du Pigeon Blanc Poitiers
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