La presse s’en est fait l’écho : malgré la crise qui se manifestait ici par un rassemblement de soutien aux sans abris, « rien n’a changé pour les vœux du président de l’agglomération et maire de Poitiers […] la foule de gens en costume d’apparat, de sacerdoce ou de ville dans l’escalier, un maelström de voitures officielles ou non obstruant l’artère derrière la mairie, interdite à la circulation et des vœux intimes ou publics comme s’il en pleuvait : le décor est resté planté. » Nouvelle République 11-01-13. D’un côté l’opulence, de l’autre l’indigence. D’un côté le champagne et les petits fours, de l’autre des familles avec des enfants qui n’ont que 250€ par mois pour vivre… Alors comment s’étonner qu’à quelques dizaines de mètres de cet Hôtel de ville luxueux, certains font les poubelles pour pouvoir manger ? VOIR
Il paraît, selon les mots de notre maire, que la politique sociale de la ville de Poitiers est une référence en France. Mais enfin, qu’est-ce donc que cette politique sociale dont la ville de Poitiers aurait à s’enorgueillir ?
En fait de politique sociale, le maire a une attitude charitable – il s’agit d’aider ponctuellement au cas par cas certaines personnes qui le mériterait – attitude charitable qui cache une politique répressive et dissuasive qui a toujours caressé le préfet dans le sens du poil. Par exemple fin 2010, face au manque criant de places d’hébergement d’urgence et à la baisse drastique des subventions de l’État envers les CHRS (- 17%), laissant à la rue de nombreuses personnes sans papiers y compris des familles avec des enfants souvent très jeunes, le maire de Poitiers a réagi violemment envers… les marchands de sommeil et les passeurs VOIR. Article publié dans Centre presse le 8 décembre, « Alain Claeys déclare la guerre aux passeurs » . Le maire PS de Poitiers, en déplaçant le problème de la question de l’hébergement d’urgence à la question des passeurs et des marchands de sommeil, est venu en aide au préfet UMP Tomasini et à son secrétaire général le fameux Setbon… en les dédouanant de leur inertie et de leurs actions illégales. Surtout que, comme l’a dit aux associations Michel Berthier adjoint à la cohésion sociale lors de leur rencontre du 22 février 2011, « Setbon sait parfaitement quand il est dans l’illégalité, et il en joue. C’est un fonctionnaire plus que zélé, qui connaît sur le bout des doigts tous les dossiers des étrangers, qui sait réagir immédiatement à tout changement de situation. Le traitement très dur des étrangers dans la Vienne est très lié à la personnalité de Setbon. » (Compte-rendu du RESF86). Bien qu’elle soit sur la ligne rouge, la préfecture ne la franchissait pas et était toujours dans la légalité concernant les titres de séjours. Par contre, concernant l’hébergement, elle se trouvait dans l’illégalité. Pourquoi le maire de Poitiers n’a-t-il pas attaqué la préfecture là-dessus ? Et surtout pourquoi lui a-t-il permis de s’en tirer à peu de frais en invoquant ces passeurs et marchands de sommeil ? C’est étonnant. Et nous sommes en présence du même mystère concernant l’expulsion du campement de sans logis et mal logés le 2 avril 2012.
Deux articles de circonstance publiés dans la Nouvelle République accompagnent l’intervention du maire. Le premier 4 jours avant sa publication dans la presse mais 2 jours après son envoi au préfet : « Première vague de froid : coup de chaud sur le 115 NR 04/12/2010 » montre comment la Croix Rouge se démène pour aider les personnes qui souffrent du froid en ce début de décembre… Éludant le fait que, s’il y a 51 personnes au gymnase en ce début de décembre, cela veut dire que le reste de l’année la préfecture ne remplit pas ses obligations puisqu’il y a au moins 51 personnes qui ne sont pas hébergées… En effet, la loi impose à l’État de prendre en charge ces personnes : “Bénéficient, sur leur demande, de l’aide sociale pour être accueillies dans des centres d’hébergement et de réinsertion sociale publics ou privés les personnes et les familles qui connaissent de graves difficultés, notamment économiques, familiales, de logement, de santé ou d’insertion, en vue de les aider à accéder ou à recouvrer leur autonomie personnelle et sociale.” Code de l’action sociale et des familles – Article L345-1
Le second, le même jour de la publication de l’intervention du maire dans la presse : « Il y a un nombre important de logements insalubres »NR 08/12/2010 », montre comment la mairie se démène pour lutter contre les marchands de sommeil… Éludant le fait que, puisque la préfecture ne respecte pas ses obligations d’hébergement envers les sans papiers, s’il n’y a pas de marchands de sommeil pour les loger, ils sont carrément à la rue… En clair, lutter contre les marchands de sommeil a un effet répressif sur les familles concernées puisque, se retrouvant à la rue, elles sont contraintes de quitter Poitiers, et un effet dissuasif sur les familles qui pourraient venir à Poitiers car elles ne trouveront plus où se loger…
Le maire a confirmé lui-même cette analyse lors du petit déjeuner « rencontre des associations » dans les salons de l’Hôtel de Ville le 4 mars 2011. Nous lisons dans le compte rendu du RESF86 : « Interpellé par nous sur la question de l’hébergement de manière plus générale, le maire est satisfait de son bilan : Poitiers fait plutôt plus qu’ailleurs en moyenne. La mairie ne peut se substituer à l’État dans le contexte actuel tout est plus difficile. Les villes sont en concurrence face à l’accueil (ou au non-accueil) des migrants. On ne peut en faire plus car il y a un risque d’afflux de ces personnes « en errance » en provenance des villes moins accueillantes. » (Souligné par nous)
C’est donc la même politique « sociale » ségrégationniste et déportationniste qui est appliquée à Poitiers aux « marginaux » et aux sans papiers. Pour que les bons poitevins puisent vivre entre eux, il faut se débarrasser de ces gens-là. Et mettre en œuvre une politique répressive pour amener les importuns à quitter Poitiers et une politique dissuasive pour empêcher que les « marginaux » et les sans papiers d’ailleurs ne viennent à Poitiers. Car on sait depuis longtemps que « charité bien ordonnée commence par soi-même… »
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