Halte au harcèlement des militants !

 

Droit Au Logement Vienne (86)

Droit Au Logement Vienne (86)

Mathieu Rigouste, dans son livre L’ennemi intérieur, La Découverte, 2009, pointe plusieurs techniques policières qui visent à lutter contre la contestation politique. Techniques élaborées patiemment depuis les guerres d’Algérie et d’Indochine et utilisées pour le maintien de l’ordre dans les banlieues, elles sont utilisées maintenant contre les militants politiques. L’une de ces techniques consiste à cibler et à harceler ceux qui sont considérés comme des « meneurs », et à les isoler du reste de la population et des militants pour pouvoir ensuite les réprimer dans une indifférence quasi générale.

Voici le détail du harcèlement de deux militants, dont on peut trouver tous les développements sur les sites www.antirep86.fr, www.democratiereelle86.fr et www.dal86.fr :

– Le 12 mai 2010, soit 15 jours avant les conseils de classe de terminale, J.-F. Prof de philo dans un Lycée de Poitiers et membre actif du Comité poitevin contre la répression des mouvement sociaux, est inspecté en urgence. Son Inspecteur Pédagogique Régional lui annonce qu’il est spécialement diligenté par le rectorat. Mais il ne veut pas dire ce qui lui est reproché et pourquoi il est là. Après l’inspection, son chef d’établissement qui est partie à la retraite depuis, lui a dit que c’était la première fois qu’elle voyait une telle chose, enfin elle l’avait vu une seule fois dans une affaire d’attentat à la pudeur de la part d’un enseignant sur l’une de ses élèves mineures ! L’inspection, la quatrième en 11 ans, n’a pas permis de trouver quoi que ce soit qui aurait justifié une sanction disciplinaire envers J.-F.

– Début novembre 2010, la Ville de Poitiers est intervenue auprès de J.F. Alors président d’une maison de quartier, le Centre Socio-culturel des 3 Cités, en lui faisant un chantage aux subventions. Elle lui a reproché non seulement ce qu’elle a appelé un « mélange des genres », à savoir d’être à la fois président d’une maison de quartier et « membre éminent » du Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux, mais aussi que la salle municipale gérée pour la Ville par cette maison de quartier ait été réservée pour la tenue d’un Forum antirépression organisé par ce comité le week-end des 13 et 14 novembre. Pour la Ville, si le Forum antirépression avait lieu dans cette salle, la préfecture risquait de supprimer les subventions annuelles de l’Etat à la maison de quartier, soit 60 000 €. Pour finir, la municipalité a proposé que le forum se déroule plutôt dans les Salons de Blossac. Devant un tel chantage aux subventions et pour mettre la maison de quartier à l’abri, J.-F. a démissionné.

Le 21 juin 2011, après avoir participé à la chorale venue chanter Hécatombe de Brassens devant le commissariat de Poitiers à l’occasion de la Fête de la musique, J.-C. est arrêté pour avoir« projeté une poignée de confettis au visage d’un commandant de police ». Le 4 mai 2012, le tribunal le reconnaît coupable d’avoir volontairement jeté ces confettis, parce qu’il a choisi de croire les témoignages favorables à ce commandant de police plutôt que ceux présentés par la défense. Coût pour J.-C. (avocat, huissier, amendes et dommages et intérêts) : 800 €.

– Le 10 janvier 2012, J.-F. est convoqué au commissariat pour « témoignage ». L’ancien préfet de région Tomasini et l’ex-secrétaire général de la préfecture Setbon ont porté plainte pour « Appel à l’atteinte à l’intégrité des personnes » après le collage sur Poitiers, début 2011, d’une dizaine d’affiches sur lesquelles il était écrit : « Tout le monde sait qui doit être expulsé. Poitevin.e émeute-toi. Setbon Tomasini hors de nos vies ». Auditionnés en décembre 2011 par une juge d’instruction, ces deux fonctionnaires avaient dit qu’ils ne connaissaient pas les auteurs de ces affiches, mais qu’il fallait voir du côté de J.-F., car celui-ci pouvait leur en vouloir pour avoir été poussé par eux à démissionner de la présidence du centre socioculturel des 3-Cités.

– Le 14 février, J.-F. est reconvoqué, cette fois pour « témoignage dans le cadre d’une enquête pour diffamation ». M. De Bony, de la Mutuelle de Poitiers, vice-président de la Fédération des agents économiques, menace de porter plainte contre Démocratie réelle maintenant – les Indignés concernant la « purification sociale » du centre-ville qui, selon lui, lui a été attribuée par cette association. En fait, ce monsieur n’a depuis pas donné suite, et la mairie pas davantage, ce qui tend à démontrer que la purification sociale du centre-ville de Poitiers est une chose avérée.

– Le 27 avril, J.-F, J.-C. et trois autres personnes sont convoqués au tribunal d’instance après l’expulsion du squat du 11, rue Jean-Jaurès qui a fait suite à un début d’incendie dans la nuit. Ils seront condamnés à payer la moitié des frais de justice, soit 380 €. Le même jour, le maire de Poitiers a attaqué nommément J.-F., J.-C. et le DAL86, sur le site de la Ville de Poitiers, affirmant qu’ils étaient des lâches, « des individus sans scrupule qui s’abritent derrière une association respectable comme le DAL, instrumentalisent des gens en souffrance, les poussent à commettre des délits et, pour finir, cherchent à remettre en cause tout ce qui a été bâti à Poitiers depuis des années en matière sociale et qui constitue, en France, une référence ». De plus, les 29, 30 avril et 2 mai, LaNouvelle République et Centre-Presse publient quatre articles mettant en cause le DAL86 et J.-F. et leur reprochant leur « silence » par rapport à des « tags de menace de mort visant le maire de Poitiers ». J.-F., J.-C. et le DAL86, ont assigné le maire de Poitiers et le directeur de publication de la Nouvelle République pour diffamation fin juin. Procès à venir.

– Le 14 juin, J.-F. est de nouveau convoqué par un officier de police judiciaire concernant le DAL86, pour les affaires du squat du 11 rue Jean-Jaurès et des tags contre le maire de Poitiers. Une baudruche qui ne s’est dégonflée lors du procès du 12 juillet après la relaxe des 3 squatters. Le président du tribunal s’est même étonné de l’absence de propriétaire à qui il avait des questions à poser en particulier pourquoi elle avait laissé son immeuble se dégrader pendant 14 ans.

– Le 14 juin, J.-C. est interpellé et placé en garde à vue pour « outrage au maire de Poitiers », sur la base de propos qu’il aurait tenus lors d’une conversation… privée ! On ignore à ce jour s’il y aura des suites judiciaires à cette « affaire ».

– Le 22 juin, J.-F. est convoqué au commissariat pour deux procédures, concernant cette fois le Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux. Il s’agit de la fin d’un tract publié sur le site d’Antirep86 qui serait une insulte à la justice ; et d’une banderole déployée, le 19 février dernier, lors d’un rassemblement appelé par le Comité et sur laquelle il était écrit « Feu aux CRA. Les matons au milieu ». J.-F. est accusé d’avoir non seulement tenu cette banderole mais aussi de l’avoir faite – alors qu’il a seulement été vu non loin de ladite banderole… et en tenant une autre, celle du Comité antirépression

– Le 10 juillet J.-F. est convoqué par son chef d’établissement qui l’a informé qu’il y aurait une plainte de parent(s) d’élève(s) auprès du rectorat. Le 10 mai dernier, il avait eu l’outrecuidance d’illustrer le propos de l’un de ses cours sur la question de l’État en faisant visionner à ses élèves un document vidéo sur l’expulsion brutale par la police, le 2 avril dernier, d’un campement de sans logis et mal logés mis en place depuis le 30 mars sur le parvis de Notre Dame à Poitiers. Comme il n’y avait rien dans le dossier, les flics ont rajouté que J.-F. aurait projeté ce document sans raisons pédagogiques, (est-ce pour qualifier une volonté de nuire ?) et que lors de lors de cette projection, il aurait fait des arrêts sur image et donné le nom des policiers qui expulsaient violemment le campement des sans-logis et mal-logés. Ses élèves auraient reconnu le père d’une élève et seraient allés « faire des remarques désobligeantes » à cette dernière. Comme il fallait s’y attendre, l’enquête administrative a tourné court puisque deux élèves ont témoigné que, si le document avait bien été diffusé, c’était dans le cadre du cours et que l’enseignant n’avait ni fait des arrêts sur image ni donné les noms des policiers. D’ailleurs il n’aurait pas eu besoin de le faire puisque, le hasard faisant bien les choses, c’étaient ces deux élèves qui avaient reconnu le policier, car ils étaient à l’époque, pour l’un le petit ami, et pour l’autre, l’ex-petit ami de sa fille. Il lui ont bien sûr dit qu’ils avaient vu son père sur la vidéo, ce qu’elle avait dû lui répéter.

– Fin septembre-octobre, la police visiblement insatisfaite de ce dénouement à convoqué pour les auditionner, tous les élèves de cette classe (soit 32 !). Cerise sur le gâteau digne des meilleurs polars, comme la proviseur ne voulait pas fournir à la police la liste des élèves et l’adresse de leurs parents, elle a été saisie au Lycée lors d’une perquisition.

– Le 11 octobre, J.-F. Subit un contrôle d’identité lors d’un rassemblement de soutien organisé par le Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux. Il avait eu l’audace de filmer l’arrestation de l’un des militants, deux policiers s’étaient mis devant l’objectif et un troisième a regardé ce qui était filmé et a considéré que c’était illégal de filmer des policier en gros plan. J.-F. Leur a bien dit qu’il connaissait ses droits et que ce qui était illégal c’était de publier des gros plan de policiers mais pas de les filmer. Les policiers ont persisté dans leur violation manifeste de la loi et insisté pour voir les films que J.-F. avait dans son appareil et ont contrôlé ses papiers.

– Lundi 19 novembre, J.-F. et deux autres personnes sont convoqués au commissariat pour « une audition suite à la participation à une manifestation non déclarée ». Ils décident collectivement de ne pas y aller.

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