Roumains : la place stratégique de la fédération des Centres Socio-Culturels 86

Droit Au Logement Vienne (86)

Droit Au Logement Vienne (86)

Voilà, ce qui en partie est la réalité du «  travail social  » effectué dans le cadre de la «  mission Rom  » assurée par la fédération des CSC86, sous la mise en œuvre d’un éducateur spécialisé de formation.

    En août dernier une jeune mère de famille vivant seule avec ses 3 enfants (3ans et 9mois) est relogée. Le lundi 18 août, cette jeune mère et ses enfants sont emmenés dans un logement vide situé hors Poitiers, elle est déposée avec ses affaires  : sacs de vêtements, un meuble, un tapis, documents administratif. Elle passera alors sa première nuit à même le sol avec ses enfants sans possibilité de cuisiner… dès le lendemain, grâce aux associations locales, en particulier Romeurope, matelas, gazinière, vaisselle… seront trouvés.

    De façon générale, il n’est pas jugé bon de préciser à l’avance aux familles déplacées dans quel quartier ou commune elles seront relogées, ni la date du relogement. Nous pouvons prendre l’exemple de cette mère de famille dont les enfants sont scolarisés aux 3 Cités, obligée de négocier avec le « travailleur social » de bien vouloir être prévenue 24h à l’avance… Pourquoi ? N’y aurait il pas quelque chose à jouer dans une démarche « d’insertion sociale » : de travailler le relogement avec les personnes concernées ?

Après plus de deux mois d’attente cette situation évoluera le 17 octobre dernier par l’expulsion hors du territoire Français du père de famille, plus tard dans la journée un fonctionnaire de la préfecture, il semblerait que ce soit le Directeur de la Réglementation et des Libertés Publiques lui-même, accompagné de deux policiers, tenterons d’expulser sans y arriver, cette jeune mère et ses trois enfants en se rendant au sein mène de leur logement provisoire !

Comment est il possible et compréhensible que d’une part la fédération des CSC86 serait en recherche de logement pour une famille et qu’en même temps cette même famille soit expulsée du territoire Français ?

    Un autre exemple permettant d’illustrer au mieux le quotidien de ces familles : fin septembre deux femmes et un homme ayant signés le contrat d’intégration dans la Vienne, s’organisent afin de se rendre en Roumanie dans l’optique de faire faire ou de refaire leur pièce d’identité, mais aussi pour des raisons familiale. Durant deux semaines, divers « arguments » seront avancés par « l’accompagnateur social » de la fédération des CSC86 afin de dissuader les familles de se rendre en Roumanie. Un ultime « argument » sera avancé, celui de la suppression de l’allocation mensuelle, c’est à dire les 250 euros du conseil général leur permettant de vivre. Les personnes concernées ont interprété judicieusement cet « argument » : « nous ne pouvons pas aller en Roumanie (environ 2 semaines pour faire faire une pièce d’identité, rdv pris pour le 3/10) sinon il nous fait couper l’aide sociale à l’enfance, l’épicerie sociale… ». Peut-on imaginer une seconde que la « mission Rom » ait un jour mené une réflexion sur l’insertion à long terme de ces familles ? Est-il possible de trouver du travail sans pièce d’identité ? De s’inscrire à pôle emploi ? D’ouvrir un compte bancaire ? Pour quelles raisons contraindre ces personnes à ne pas quitter la France alors que la préfecture cherche à expulser d’autres familles comme nous venons de le voir ? Cela consisterait à dire : vous avez voulu venir en France vous y êtes mais dans la pauvreté et la soumission ! Au mieux nous parlons là d’incompétence, au pire d’assignation à résidence.

    La liste est longue  : obligation de rendre tous documents disponibles, absence de médiation et de travail partenarial, rendez vous impromptu au domicile des personnes ou absence d’accompagnement durant plusieurs mois….

Au lendemain de la première expulsion de Squat, celui des Glières, occupé par des familles ressortissantes Européennes le 23 octobre 2013, la préfecture a mis sur la table une certaine somme d’argent afin de créer une « mission Rom » dans la Vienne (Chose curieuse, cette mission censée répondre au cadre de la circulaire d’août 2012 dite de démantèlement des camps, n’est pourtant pas financée par la DIHAL, délégation interministérielle pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans-abri ou mal-logés, si on se réfère au rapport et cahier des charges). Malgré de nombreuses sollicitations de la part du collectif Romeurope86, tout au long de l’année 2013, la préfecture de la Vienne n’ayant pas répondu à la première directive de la Circulaire qui est l’anticipation et le diagnostique social global, a crée cette mission.

Cette mission sous tendue d’un poste fut confiée à la fédération des Centres Sociaux-Culturels de la Vienne, jusqu’en août 2014. Cette dernière, s’est de nouveau positionnée favorablement au renouvellement de cette « mission  » et de son enveloppe budgétaire jusqu’en août 2015.

Depuis fin octobre 2013, un salarié suit à plein temps en concertation avec la DDCS (Direction Départementale de la Cohésion Sociale) de la préfecture et 3 associations  : l’ADAPGV (Association pour l’Accueil et la Promotion des Gens du Voyage de la Vienne), le Toit du Monde et la Croix Rouge 86, la situation d’une partie des familles (6 au lendemain de l’expulsion et 9 aujourd’hui) dites « Roms » ayant vécu en squat et ayant été « choisies », les autres ayant reçu des OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français).

Dès le départ cette «  mission  » avait pour but d’éviter tout échange et travail partenarial avec les associations mobilisées autours de ces familles depuis début 2013 et actives sur la question au niveau national, DAL, Romeurope, Amnesty international, Médecins Du Monde… A la place a été créé un «  pôle de compétence  » regroupant la Croix-Rouge, l’ADAPGV, le Toit du Monde, le travailleur social de la «  mission Roms  » et la DDCS, qui se réunit bi-mensuellement afin d’échanger sur le sort de ces 6 puis 9 familles dites «  Rom  ».

Afin de se donner un cadre d’action et de légitimité, ce «  pôle de compétence  » s’est doté d’un «  contrat d’accompagnement et d’intégration dans la Vienne  » (Contrat parcours engagement intégration-1) rédigé tout spécialement pour ces quelques familles dites «Roms» et dorénavant intégrables dans le 86…

Ce contrat dont nous ne citerons que deux extraits est « éthiquement brillant » lorsqu’on tend à se placer dans une démarche de travail social et d’interculturalité.

    La durée de « l’accompagnement social » effectuée par la fédération des CSC86 est soumise à la durée du titre de séjour. Or, aucune des familles n’a eu de prétendu « titre de séjour » ;

    toute personne adulte doit transmettre les renseignements nécessaires au travailleur social… et autoriser celui ci à saisir et transmettre les données le concernant aux autorités compétentes (préfecture, DDCS, SIAO…).

Dès le début, face à l’absurdité de ce document, les familles, qui, déjà bien intégrées, ne peuvent accepter une telle infantilisation, ont refusé de signer. La DDCS et la fédération ont utilisé alors une nouvelle stratégie. Désormais les familles sont obligées de signer ce contrat contre un hébergement. En d’autres terme pas de contrôle social via la fédération, pas d’hébergement ! Et c’est ainsi que ne pouvant renoncer à avoir un toit pour vivre ces quelques familles se retrouvent assujetties à des visites opportunes, intrusives, à livrer des récits de vie chaque quinzaine aux «  autorités compétentes  » et à leur fournir des preuves d’insertions…

C’est également ainsi que les structures logeant ces familles (Croix-Rouge, Audacia, Secours catholique, Coalia…) ont rajouté dans leur contrat d’hébergement et d’accompagnement traditionnel un petit paragraphe spécifique «  Roms  » : « l’accompagnement social lié au logement sera effectué par votre référent de la fédération des Centres Sociaux Culturels de la Vienne ».

Un relogement répondant donc à une loi d’exception, un relogement pour 2 fois 6mois, peut être que les «  Roms  » ont besoin d’un contrôle spécifique ? Peut être ne savent ils pas vivre de façon sédentaire ? Peut être ne savent ils pas tirer la chasse d’eau  ? Et oui, autant de questions que se posent les « autorités compétentes » !

Et quelle sera donc la position de la fédération des CSC86 au lendemain de cette année de relogement ? Quelle est donc la réflexion de la fédération des CSC sur une loi d’exception propre à 9 familles « Rom » de Poitiers  ? Quel travail d’accompagnement social lié au logement est-il effectué  ? Quelle position à la fédération, sur la situation des nombreuses familles Roumaines de culture Tsigane ou non vivant dans des conditions insalubres ou à la rue à Poitiers  ? Dans quelle démarche de réflexion régionale, nationale sur le sujet se situe la fédération des CSC 86  ? Si la fédération des CSC 86 suit et contrôle ces familles, qui contrôle le suivi et le contrôle de la « mission  roms » ?

D’autre part si la « mission Rom » à Poitiers rentre dans le cadre de la circulaire du 26 Août 2012, relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites comme le prétendent la préfecture et la DDCS, pourquoi les familles habitant actuellement dans les deux squats de Poitiers n’ont à ce jour jamais rencontré la fédération des CSC  ? Comment la fédération prévoit-elle d’accompagner et d’intégrer ces personnes dans le 86  ?

La fédération a-t-elle la moindre petite idée de l’accompagnement qui est mis en place par exemple sur le Gibautel par des bénévoles de Romeurope et du DAL depuis février dernier ? Quelles seront les séquelles de la violence d’une probable nouvelle expulsion par les forces de l’ordre et non anticipée, pour les hommes, femmes et enfants ? Ou était la fédération des CSC86 le matin du 21 octobre dernier lorsque l’huissier et une entreprise de déménagement ont essayé de faire partir les familles y résidant ? Quelle sera une nouvelle fois la place de la fédération des CSC lorsqu’à 8 heures du matin les familles seront probablement emmenées au gymnase des écossais ? Décidément les stades et les gymnases seront toujours d’actualité en cas de malheur social !

Enfin un dernier point sur l’appellation elle même de cette mission «  Rom  ». La fédération certes le sait, mais l’Association Départementale pour l’Accueil et la Promotion des Gens du Voyage, le Toit du monde… savent-ils que l’ensemble des personnes de nationalité Roumaine ne partagent pas forcement la culture « Rom »  ? Savent-ils que certaines personnes soumises au contrat dans le cadre de la « mission rom » ne se reconnaissent pas comme Rom ? Ces associations ont elles menées une réflexion autour de cette stigmatisation opérée ici à Poitiers ?

Quelle est donc la position de la fédération des CSC nationale sur cette «  mission rom  » et son application ? Quelle réflexion est menée par la fédération 86 et ses 19 associations et CSC membres  ? Car si un certain nombre de ces 19 structures, ou encore des 1200 que compte le FCSF peuvent se sentir ou sont éloignés de cette «  mission  », il n’empêche que tous sont fédérés autour d’un projet commun, un projet « militant » basé sur des principes de démocratie, de solidarité et de dignité humaine.

Nous souhaiterions finir par le mot du président de l’ADAPGV, celui ci permettant de lever le doute sur les stratégies politiques, financières, d’exclusion de la fédération des CSC….

« Je voudrais terminer ce rapport moral par une question qui a encore défrayée la chronique ces derniers temps, il s’agit bien sûr de la question des «Rroms».

Comme toute association de caractère humanitaire et sensible aux droits de l’homme, l’ADAPGV est concernée par cette question….

C’est pourquoi, concernant l’urgence de la situation à traiter -celle des sorties de squats pour les familles – nous avons choisi d’agir et de participer à une action plus collective, notamment avec le Toit du Monde. Cette action est pilotée à la demande des principaux acteurs par la Fédération des Centres Sociaux de la Vienne, qui a donné ainsi à cette intervention la distanciation nécessaire au contexte local, marqué souvent par certaines exagérations auxquelles nous ne souhaitions pas mêler notre voix. Cette action délicate donc est encore en cours. Nous participons à son suivi et à son évaluation, et nous aurons à nous situer quant à son devenir…

Ce contexte a aussi été l’occasion d’approfondir nos échanges avec les services de la Préfecture et de l’État, et si les relations de travail sont continues et placées sous le signe de la bonne compréhension et de la bonne entente avec la DDCS, nous avons mieux que par le passé enclenché des chantiers de travail avec les services préfectoraux -cabinet et secrétariat général-concrétisant ainsi un des points de notre projet associatif que je rappelle : …« Par sa dynamique partenariale et son expérience acquise, l’ADAPGV s’attache à faire connaître auprès de ses partenaires et du public les caractéristiques de l’histoire de la culture et des modes de vie des gens du Voyage afin que les politiques publiques prennent en compte ces particularités»…C’est donc avec une certaine tranquillité…. »

Les associations militantes et les familles sont alors ravies d’avoir pu servir à accentuer la bonne entente et souder le partenariat entre la fédération des CSC86 et les services de l’Etat  !

DAL86dal86@free.fr – 06 52 93 54 44
Permanences : tous les samedis matin de 11h à 12h Maison de la Solidarité 22 rue du Pigeon Blanc Poitiers

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